Le gouvernement fédéral doit se concentrer sur des projets concrets pour stimuler les investissements étrangers et la croissance économique

Les coprésidentes de la Coalition déclarent à la
commission bancaire du Sénat : « Construisons un projet! »

De nombreux chefs de la direction d'entreprises internationales ont du mal à stimuler les investissements étrangers au Canada en raison de l'environnement réglementaire, mais aussi à cause de l'inaction perçue des gouvernements en matière de projets d'infrastructures, selon les coprésidentes de la Coalition, Lisa Raitt et Anne McLellan.

« Nous ne construisons rien. Nous annonçons prévoir investir, beaucoup d'annonces à l'appui, mais nous ne sommes toujours pas en mesure de démontrer que nous pouvons passer de la parole au geste », a déclaré Mme Raitt devant le Comité sénatorial permanent des banques, du commerce et de l'économie le 3 mai dernier. « Ce gouvernement doit s'attacher, plus particulièrement au niveau fédéral, à démontrer qu'il peut mettre en œuvre un projet concret. Il se doit d'en faire la démonstration pour que les investissements reviennent au Canada ».

Le Comité mène une étude sur les investissements des entreprises au Canada et sur les obstacles à la croissance. La sénatrice conservatrice Elizabeth Marshall a fait valoir que le régime réglementaire du pays est « si restrictif » qu'il freine les investissements des entreprises. « Une fois que vous avez obtenu l'autorisation, l'autorisation réglementaire, et que vous entreprenez le projet, le gouvernement impose d'autres réglementations, ce qui incite les entreprises à se détourner », déclarait-elle. 

Mme McLellan a soutenu que les entreprises ne veulent pas investir au Canada. « Les professionnels du commerce se sont rendus en Chine et en Corée du Sud. Ils souhaiteraient investir au Canada », a-t-elle déclaré. Mais ils s'interrogent : « Est-il réellement possible de bâtir un projet? Bien sûr, ils ont de l'argent [...] qu'ils aimeraient investir au Canada. Mais toute la question est de savoir s'il est possible de construire un projet.

Les coprésidentes ont proposé une possible solution : inviter quatre sous-ministres à choisir un projet et à collaborer entre eux pour le mener à bien. Mais il faudrait pour cela leur donner toutes les ressources nécessaires et leur accorder priorité dans le cadre du processus réglementaire actuel, en temps opportun. 

« Cela peut se faire. Je pense qu'il s'agit simplement de capitaliser sur un projet particulier, de le bâtir et de l'utiliser comme vitrine, et comme preuve que nous pouvons faire quelque chose », a déclaré Mme Raitt. « Le fait demeure : nous devons bâtir un projet. »

McLellan est d'accord. « Nous avons le fardeau de la preuve. Comme le dit Lisa, bâtissons un projet ».

La complaisance : un défi majeur pour les entreprises canadiennes

Le sénateur indépendant Colin Deacon, vice-président du Comité, a interrogé Mme Raitt et Mme McLellan à propos des indicateurs du Tableau de bord de la Coalition relatifs à l'investissement dans la propriété intellectuelle par travailleur, l'investissement dans les actifs corporels, l'investissement des entreprises ainsi que la recherche et le développement.

« Quels sont les principaux enseignements tirés, et quels sont les domaines dans lesquels vous souhaiteriez que nos recommandations contribuent à faire avancer les choses? Avez-vous des exemples et des suggestions à nous proposer? Nous voulons que notre rapport en tienne compte », a-t-il indiqué. 

Mme McLellan a fait valoir que le dossier de l'innovation était depuis longtemps un enjeu pour les gouvernements. Pour avoir été ministre pendant 13 ans, elle a déclaré avoir « investi énormément de temps à discuter » de ce qui devait être entrepris pour rendre le Canada plus innovant.

« Nous avons des crédits de R et D qui comptent parmi les plus généreux au monde pour le secteur privé. Mais posons-nous la question : pourquoi le secteur privé ne tire-t-il pas parti de cet espace fiscal? Ou est-ce le cas? L'enjeu est important. Sont-ils actuellement, en fait, structurés de façon propice pour stimuler l'investissement? Par ailleurs, les entreprises canadiennes doivent pouvoir avoir l'assurance que les règles ne changeront pas : elles connaissent les règles et le cadre qui conditionnent la croissance économique ; elles connaissent aussi le plan et savent qu'elles peuvent compter sur nos gouvernements pour les aider à le mettre en œuvre. C'est un défi permanent. »

Le Tableau de bord indique que le PIB par habitant demeure inférieur aux niveaux qui prévalaient avant la pandémie. Il montre également que les dépenses des entreprises en R et D continuent de stagner et que le Canada est à la traîne par rapport à ses pairs internationaux.

En pourcentage du PIB, la R et D des entreprises s'est maintenue à un peu moins de 0,7 % au cours des 15 dernières années et ne semble pas se rapprocher de l'objectif de 1,8 % fixé par la Coalition d'ici à 2030. Cette donnée est bien inférieure à celle qui prévaut aux États-Unis, ce qui permet de croire que la faible contribution du secteur privé canadien à l'innovation compromet notre capacité d'instaurer un avantage concurrentiel.

Il en va de même pour l'investissement dans la propriété intellectuelle et les moyens mis en œuvre pour dépasser le seuil de deux pour cent du PIB. La situation a peu changé par rapport à la situation à il y a vingt ans.

Selon M. McLellan, la complaisance est la raison de tout cela.

« Nous nous satisfaisons de notre bonne qualité de vie ; avec le résultat que nous nous reposons sur nos lauriers, car nous manquons de motivation pour prendre des risques, faire des investissements et trouver des capitaux », affirmait-elle.

Mme Raitt a abondé dans le même sens, tout en soulignant qu'une fois que les entreprises sont installées ici, il est extrêmement difficile de les maintenir ici.

« C'est également là un aspect que nous devons examiner de plus près. L'état de santé de l'industrie, des technologies propres et des personnes au Canada est intimement lié à d'autres facteurs : où en sommes-nous en matière d'immigration, de santé et d'éducation. Ces aspects conditionnent la volonté des entreprises de rester ici et de se développer », a fait valoir Mme Raitt. S'ils sont négligés, il en résulte que certains entrepreneurs qui atteignent un certain niveau - de l'ordre de 5 millions de dollars - se demandent ensuite : « Qui pourrait nous acheter?  » Ou encore, quelqu'un propose de les acquérir, ou d'acquérir leur propriété intellectuelle. Les mesures d'accompagnement, les crédits d'impôt et les mesures incitatives que nous saurons mettre en place seront déterminants pour les inciter à rester et à construire au Canada.

Il faut stimuler la concurrence au Canada

À propos de la question de l'innovation, le sénateur Clément Gignac, du Groupe progressiste du Sénat, a demandé si la création par le gouvernement d'une Corporation d'innovation du Canada est l'approche à privilégier. 

« Je ne suis pas certain que la création de sociétés semblables résoudra notre problème au Canada », déclarait-il.

Mme McLellan a fait valoir que Mme Raitt et elle-même ont souvent entendu, dans le cadre de leurs discussions avec les membres, que les programmes du gouvernement sont trop difficiles à comprendre. « Le gouvernement du Canada a mis beaucoup d'argent sur la table : fonds de croissance, fonds d'innovation, fonds d'innovation stratégique ou Fonds stratégique pour l'innovation (FSI), notamment. Ceux qui souhaitent accéder à ces fonds doivent discerner s'ils peuvent même en faire la demande. Ils ont du mal à y voir clair. », déclarait-elle.

Elle a également fait valoir que lorsqu'ils s'adressent aux ministres, on leur répond que le problème n'est pas un manque de financement. « Le problème, c'est qu'il y a confusion quant à la nature de tous ces fonds. Quels sont les résultats poursuivis par l'utilisation de ces fonds pour que nous puissions livrer ces résultats aux Canadiens? », indiquait-elle. « Je pense que nos membres sont conscients de la valeur des fonds créés par le gouvernement. Mais ils souhaiteraient que soit établi, en quelque sorte, un plan à long terme à propos de ces fonds, afin de pouvoir déterminer leur pertinence et de savoir comment ils peuvent accéder au financement - avec confiance et certitude - pour atteindre leurs objectifs ».

La présidente du Comité, Pamela Wallin, a répondu : « Je pense que vous venez de résumer notre rapport pour nous. C'est ce que nous entendons depuis maintenant quatre mois. Merci beaucoup ».

Mme Raitt a tenu à préciser que le manque de concurrence au Canada est un autre problème qui explique le manque d'investissement et d'innovation. 

« La concurrence est un des éléments moteurs de l'investissement des entreprises. Quand de très grandes entreprises - principalement fédérales - ont pratiquement le champ libre, elles ont peu de raison de se faire concurrence, que ce soit en étant plus efficaces, en investissant dans leurs entreprises ou en formant mieux leur personnel pour offrir un meilleur service à la clientèle », a-t-elle fait valoir. « Je pense que nous devons stimuler la concurrence à l'intérieur même du pays. Le libre-échange entre nos provinces est une des possibilités dont nous parlons pour ce faire. »

Mme McLellan s'est montrée d'accord et estime qu'il s'agit d'un aspect important de l'innovation dans les entreprises. « C'est la concurrence qui fait avancer les choses à cet égard. Si vous savez que vous devez investir et vous montrer plus judicieux pour maintenir vos activités et obtenir accroître votre part du marché, sous l'effet de la pression concurrentielle, il est permis de croire que cela stimulera l'investissement et que les gens utiliseront de manière appropriée tous les crédits disponibles », a-t-elle fait valoir.

L'approche traditionnelle de la carotte et du bâton traditionnels est également importante, mais les deux approches doivent être combinées efficacement », a déclaré M. Raitt, ajoutant qu'il est également essentiel de pouvoir mesurer les progrès réalisés.

« C'est la nouveauté que nous apportons à la table », a-t-elle déclaré, évoquant le Tableau de bord de la Coalition. « C'est, selon nous, un outil très important puisqu'il permet aux gouvernements de voir l'état des lieux, comme pays, dans certains secteurs très importants, et d'orienter nos actions. Nous estimons que si nous atteignons les objectifs établis, d'ici 2030, le Canada sera dès lors une des économies les plus compétitives, les plus inclusives et les plus durables au monde. »

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